Xavier Bertrand est passé maitre en boniments. Hier, à l’Assemblée nationale, le ministre se défendait de vouloir supprimer la durée légale des 35 heures. Ne fût-ce, précisait-il, que pour pouvoir payer les heures supplémentaires.
Problème : les heures supplémentaires (exonérées) ne tendent-elles pas, dans le projet gouvernemental, à devenir la règle, et la « durée légale » « l’exception » ? Autre question : quel libre choix, même concerté avec le patron, aura le travailleur de travailler au-delà des trente-cinq heures, si c’est « l’entreprise » qui décide qu’il faut allonger le temps de travail ?
Au gré des rapports de forces entre la direction et les organisations syndicales, le salarié risque de devenir plus encore qu’auparavant une simple variable d’ajustement. Et c’en sera fini avec le « système des 35 heures », pronostique de son côté Patrick Devedjian.
Le coup de force du gouvernement a consisté à introduire, dans un projet de loi sur la représentativité syndicale, ces dispositions qui avaient été rejetées par les syndicats. Il relance le débat. L’Humanité met cartes sur table. C’est le sens de la présentation, que nous avons voulue la plus complète et accessible possible, du projet gouvernemental.
À quelques jours de la journée de mobilisation du 17 juin à l’appel notamment de la CGT, de la CFDT, de Solidaires, de la FSU, du SGEN-CFDT…, juger sur pièce est le meilleur antidote à la campagne politico-médiatique orchestrée depuis l’Élysée.
Jean-Paul Piérot
Article 15
Les conditions d’une utilisation massive
des heures supplémentaires
Cet article modifie la valeur du contingent annuel des heures supplémentaires et supprime le repos compensateur. Il met en place les conditions d’une utilisation massive des heures supplémentaires par les employeurs.
La situation actuelle
Le contingent annuel d’heures supplémentaires
Un employeur peut faire faire des heures supplémentaires à ses salariés dans le cadre d’un « contingent », un nombre maximum d’heures fixé pour l’année. Ce contingent peut être fixé librement par un accord de branche ou d’entreprise. À défaut, c’est la loi qui fixe sa hauteur (à 220 heures aujourd’hui). Si un employeur veut dépasser ce contingent, il doit demander l’autorisation à l’inspecteur du travail.
Le repos compensateur
C’est un repos obligatoire qui compense les heures supplémentaires effectuées au-delà d’un certain seuil (en particulier le contingent annuel). Son objectif est de dissuader l’employeur de recourir trop massivement aux heures sup et de favoriser - l’embauche.
Dans les entreprises de moins de 20 salariés, les heures sup effectuées au-delà du contingent annuel donnent droit à un repos compensateur de 50 %. Autrement dit, si le salarié a effectué dans l’année vingt heures au-delà du contingent annuel d’heures sup, il a droit à dix heures de repos payées en plus des majorations versées pour les heures supplémentaires.
Dans les entreprises de plus de 20 salariés, les heures sup effectuées dans l’année au-delà du contingent donnent droit à un repos obligatoire de 100 %, soit une heure de repos pour une heure sup. Dans ces entreprises, les heures effectuées chaque semaine au-delà de la 41e heure donnent également droit à un repos compensateur, qui est de 50 %.
Il existe une autre forme de repos compensateur, qui est le « repos compensateur de remplacement » : c’est la possibilité pour un accord collectif de prévoir, dans certaines conditions, le remplacement du paiement des heures sup ou d’une partie d’entre elles par du repos.
Le texte de loi
Contingent annuel et repos compensateur
I. Les articles L.3121-11 à L.3121-14 du Code du travail sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. L.3121-11-1. Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d’un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement tel que prévu à l’article L.2232-12 ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.
- Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement tel que prévu à l’article L.2232-12 ou, à défaut, une convention ou un accord de branche, fixe, nonobstant la majoration des heures supplémentaires, les conditions d’accomplissement dsupplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi qu’une contrepartie obligatoire en repos pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
- À défaut d’accord collectif, un décret détermine ce contingent annuel et la contrepartie obligatoire en repos pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
Notre commentaire. Comme aujourd’hui, l’accord collectif fixe la hauteur du contingent annuel d’heures supplémentaires. La nouveauté, c’est que l’accord fixe aussi les conditions dans lesquelles il peut être - dépassé. Par ailleurs, l’article L.3121-19, selon - lequel l’employeur devait obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail pour pouvoir faire faire des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, est supprimé. Cet article visait - explicitement à favoriser l’embauche plutôt que le recours aux heures sup : « En cas de chômage (l’inspecteur du travail) peut en interdire le recours en vue de permettre l’embauche de travailleurs sans emploi. » Le contingent annuel perd donc son caractère contraignant.
L’avant-projet de loi supprime également le - repos compensateur obligatoire. À la place, la - négociation devra prévoir une « contrepartie obligatoire en repos » pour toutes les heures sup effectuées au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires. Le texte n’évoque aucune - durée minimale pour ce repos : en théorie, il pourrait donc être quasiment nul.
Repos compensateur de remplacement
- À défaut de détermination du contingent annuel d’heures supplémentaires par voie conventionnelle postérieure à l’entrée en vigueur de la loi nº… du…, les modalités de son utilisation donnent lieu au moins une fois par an à une consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel s’il en existe.
« Art. L.3121-12. Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche, peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations prévues à l’article L.3121-22, par un repos compensateur équivalent
À défaut d’accord collectif et, le cas échéant, en l’absence d’opposition du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, ce remplacement est mis en place par l’employeur.
Le salarié peut, en accord avec son employeur, obtenir le paiement de ce repos compensateur. »
Notre commentaire. Dans l’avant-projet de loi, le repos compensateur de remplacement est remplacé par un « repos compensateur équivalent ». Difficile de dire aujourd’hui quelle incidence peut avoir ce changement de vocabulaire.
II. Les articles L.3121-17 à L.3121-19 sont supprimés.
Les articles L.3121-17 et 18 concernent les heures choisies, des heures de travail que le salarié peut effectuer au-delà du contingent annuel, par accord de gré à gré avec son employeur. Peu utilisées, elles n’ont plus d’objet, puisque le contingent annuel perd son caractère contraignant.
L’article L.3121-19 est celui qui conditionne le dépassement du contingent d’heures sup à l’autorisation de l’inspecteur du travail.
Par ailleurs, l’avant-projet de loi supprime, sans le remplacer, l’article qui prévoyait que le contingent annuel d’heures sup était réduit à 130 heures par an et par salarié en cas d’accord d’annualisation ou de modulation prévoyant des variations importantes de la durée du travail.
III. Les articles L.3121-24, L.3121-26 à L.3121-32 sont supprimés.
IV. Dans l’attente de leur adaptation au nouveau cadre légal posé par le présent article, les clauses des conventions et accords conclus sur le fondement des articles L.3121-11 à L.3121-21 du Code du travail dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la présente loi restent en vigueur jusqu’au 31 décembre 2009 à compter de la promulgation de la présente loi. À titre transitoire, et pendant cette période, la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent visé au 3 et 4 de l’article L.3121-11 du Code du travail est fixée à 50 % pour les entreprises de 20 salariés au plus ou à 100 % pour les entreprises de plus de 20 salariés.
Cet article précise le régime transitoire des heures sup jusqu’à la négociation de nouvelles conventions ou accords. Pendant cette période, les règles actuelles resteront en vigueur.
Conclusion. Le nouveau texte permet à la négociation de fixer les contingents annuels d’heures supplémentaires, mais aussi les conditions dans lesquellesseront dépassés. Aujourd’hui, le contingent annuel d’heures supplémentaires ne peut être dépassé qu’après l’autorisation de l’inspecteur du travail. Cette condition est supprimée, le contingent est donc vidé de sa substance. Et comme la « contrepartie obligatoire en repos » ne s’applique qu’au-delà du contingent, les branches ou les entreprises peuvent très bien négocier des contingents à des niveaux qu’aucun salarié n’atteindra jamais. Ainsi, elles n’auront pas à appliquer la contrepartie obligatoire en repos…
Article 16
Les forfaits ou comment échapper à la mesure de la durée du travail
Le texte assouplit encore le recours au forfait en jours, qui dispense l’employeur d’avoir à mesurer le temps de travail des salariés concernés.
Il existe deux types de forfaits. Le forfait « de droit commun » permet de rémunérer sur la semaine ou sur le mois un nombre constant d’heures supplémentaires. Le forfait « en jours » dispense l’employeur de mesurer le temps de travail du salarié concerné, lequel bénéficie en contrepartie de jours de repos.
Le texte de loi
Le forfait de droit commun
I. Les dispositions de la section 4 du chapitre 1er du titre II du livre premier de la troisième partie du Code du travail sont remplacées par les dispositions suivantes
« Sous-section 1. Conventions de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois
Article L.3121-38. La durée du travail de tout salarié peut être fixée, sans accord collectif préalable, par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois.
Notre commentaire. Rien de neuf ici : ces dispositions concernent le forfait « de droit commun ». La jurisprudence exige que le nombre d’heures à effectuer soit connu à l’avance. La rémunération du salarié doit être au moins égale à celle qu’il recevrait compte tenu des majorations des heures supplémentaires.
La mise en place d’un forfait annuel
Sous-section 2. Conventions de forfait sur l’année
§1. Mise en place des conventions de forfait sur l’année
Article L.3121-39. La conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. L’accord fixe la durée annuelle de travail à partir de laquelle le forfait est établi. et prévoit les catégories de salariés susceptibles de bénéficier de ces conventions individuelles de forfait ainsi que les modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d’être conclues.
Il s’agit des conditions actuelles de mise en place, par accord collectif, des forfaits en heures et en jours sur l’année.
Le forfait annuel en jours
§2. Convention de forfait en jours sur l’année
Article L.3121-40. Peuvent conclure des conventions de forfait en jours sur l’année, dans la limite de la durée annuelle de travail applicable aux conventions individuelles de forfait fixée par l’accord collectif :
- les cadres définis par l’accord au regard de leur autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés ;
- les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées.
Notre commentaire. L’avant-projet de loi reprend la définition actuelle, très extensive, des salariés qui peuvent être concernés par le forfait annuel en jours. La loi Aubry de 2000 prévoyait trois conditions : les salariés concernés devaient être des cadres dont la durée du travail ne pouvait être prédéterminée, du fait de la nature de leurs fonctions, des responsabilités exercées, du degré d’autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. Depuis, le nombre de salariés potentiellement concernés a progressivement été élargi : cadres simplement « autonomes », mais aussi salariés non cadres dont la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps.
Article L.3121-41. L’accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, la convention ou l’accord de branche instaurant les conventions individuelles de forfait en jours fixe la durée annuelle de travail, dans la limite de deux cent dix-huit jours. Il fixe par ailleurs le nombre annuel maximal de jours travaillés. À défaut d’accord, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel lorsqu’ils existent, l’employeur fixe ce nombre annuel maximal. Dans le respect des dispositions relatives aux repos quotidien et hebdomadaire et aux congés payés, ce nombre peut excéder deux cent dix-huit jours.
Notre commentaire. C’est une nouveauté : jusqu’à maintenant, c’est l’accord collectif qui met en place le forfait qui doit fixer le nombre maximal de jours travaillés par le salarié, dans la limite de 218 jours par an. Le texte prévoit qu’à défaut d’accord (c’est-à-dire si l’employeur n’a pas réussi à obtenir l’accord des négociateurs sur ce point), l’employeur peut fixer ce nombre lui-même, après une simple consultation du comité d’entreprise.
Article L.3121-42. Le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, travailler au-delà de la durée annuelle fixée par la convention individuelle de forfait ou renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire, dans le respect du nombre annuel maximal de jours travaillés fixé en application de l’article L.3121-41.
La rémunération majorée, qui ne peut être inférieure à la valeur afférente à ce temps de travail supplémentaire majorée de 10 %, est négociée entre le salarié et l’employeur.
Article L.3121-43. Un entretien annuel individuel est organisé avec chaque salarié sur sa charge de travail.
Notre commentaire. Avec les forfaits annuels en jours, on a vu le temps de travail des cadres exploser. La mesure de la charge de travail est donc fondamentale. Jusqu’à maintenant, les « modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés concernés » et « l’amplitude de leurs journées d’activité » et « la charge de travail qui en résulte » sont des thèmes qui doivent obligatoirement être négociés lors de la mise en place de ces forfaits. L’avant-projet de loi fait disparaître cet élément subs- tantiel de la négociation au profit d’un simple entretien à la portée très vague, dont on voit mal comment il peut garantir au salarié une « durée raisonnable » de travail.
Article L.3121-44. Lorsqu’un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, nonobstant toute clause contraire, conventionnelle ou contractuelle, saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi eu égard notamment au niveau du salaire minimum conventionnel applicable ou, à défaut, de celui pratiqué dans l’entreprise, et correspondant à sa qualification.
Il s’agit de la reprise du texte actuel, qui reprenait la jurisprudence.
Article L.3121-45. Les salariés concernés par une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives :
- à la durée légale hebdomadaire prévue à l’article L.3121-10 ;
- à la durée quotidienne maximale de travail prévue à l’article L.3121-34 ;
- aux durées hebdomadaires maximales de travail prévues au premier alinéa de L.3121-35 et aux premier et deuxième alinéas de l’article L.3121-36.
Notre commentaire. Le texte reprend le régime imaginé par la loi Aubry. Les salariés en forfait jours échappent à la législation sur la durée du travail : ils ne sont soumis ni à la durée légale hebdomadaire de 35 heures ni aux durées maximales de travail quotidiennes et hebdomadaires. Les seules garanties qui les concernent sont les repos minimaux : onze heures par jour, trente-cinq heures consécutives par semaine.
Le forfait annuel en heures
§ 3. Convention de forfait en heures sur l’année
Article L.3121-46. La rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures est au moins égale à la rémunération qu’il recevrait compte tenu du salaire minimum conventionnel applicable dans l’entreprise et des majorations pour heures supplémentaires prévues à l’article L.3121-22.
II. L’article L.2323-29 est complété par les dispositions suivantes : « Le comité d’entreprise est consulté chaque année sur l’aménagement du travail sous forme de forfait jours ainsi que sur les modalités de suivi des salariés concernés. »
III. Les accords conclus en application des articles L.3121-40 à L.3121-51 du Code du travail dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la présente loi restent en vigueur.
Conclusion. Le régime dérogatoire du forfait annuel en jours, qui fait échapper les salariés concernés à toute mesure du temps de travail, a valu à la France d’être condamnée en 2001 par le Comité européen des droits sociaux. Cette instance du Conseil de l’Europe a reconnu que le forfait jours était contraire à la charte sociale européenne révisée, parce qu’il permettait des durées du travail trop longues. Cette condamnation n’a eu aucun effet sur la France, qui a continué d’étendre le dispositif à des catégories plus larges de salariés.
Article 17
Le recours à la modulation et à l’annualisation facilité
Cet article facilite la mise en place de l’annualisation et de la modulation des horaires de travail sur une partie de l’année : ces aménagements du temps de travail permettent à l’employeur de faire coïncider au plus près effectifs et programme de production.
L’annualisation et la modulation des horaires de travail sur une partie de l’année, dispositions centrales de la loi Aubry, ont été plébiscitées par les employeurs : ils pouvaient faire varier la durée du travail d’une semaine à l’autre sans avoir à payer des heures supplémentaires lors des périodes « hautes » et sans avoir à mettre les salariés au chômage technique pendant les périodes « basses ».
Le texte de loi
Les dispositions de la section première du chapitre 2 du titre II du livre premier de la troisième partie sont remplacées par les dispositions suivantes :
« Section I. Répartition des horaires
Sous-section 1. Répartition des horaires sur tout ou partie de l’année
Article L.3122-1. Un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche, peut définir les modalités d’aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur tout ou partie de l’année. Il prévoit :
- les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d’horaire de travail ;
- les limites pour le décompte des heures supplémentaires ;
- le cas échéant, les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours d’année.
À défaut d’accord collectif, un décret définit les modalités et l’organisation de la répartition de la durée du travail sur plusieurs semaines.
Notre commentaire. L’avant-projet de loi allège considérablement le contenu obligatoire de l’accord collectif exigé pour instaurer ce système. Le projet du gouvernent n’impose que de négocier les conditions et le délai de prévenance, les limites pour le décompte des heures supplémentaires, les modalités de fixation de la rémunération et des repos des salariés absents pendant l’année, ou qui sont arrivés ou repartis en cours d’année. Le texte en vigueur actuellement est beaucoup plus complet : il impose de négocier le programme indicatif de la répartition de la durée du travail sur l’année, les modalités de recours aux intérimaires et les conditions de recours au chômage partiel pour les heures qui ne sont pas prises en compte dans la modulation. Autre allégement de taille : le nouveau texte n’oblige plus l’accord à préciser la justification économique et sociale de la modulation.
Toutefois, dans les entreprises qui fonctionnent en continu mentionnées à l’article L.3132-14, l’organisation du temps de travail peut être réalisée sur plusieurs semaines par décision de l’employeur.
Notre commentaire. Le texte prévoit que dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l’employeur pourra décider seul de l’organisation du temps de travail sur plusieurs semaines. Il n’aura plus à consulter le comité d’entreprise.
Sauf stipulations contraires d’un accord d’entreprise ou d’établissement, la semaine civile débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures
Article L.3122-2. Lorsqu’un accord collectif aménage une variation de la durée de travail hebdomadaire sur tout ou partie de l’année ou lorsqu’il est fait application de la possibilité de calculer la durée du travail sur plusieurs semaines par décret prévu à l’article L.3122-1, constituent des heures supplémentaires :
- les heures effectuées au-delà de 1 607 heures annuelles ou de la limite annuelle inférieure fixée par l’accord, déduction faite, le cas échéant, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire éventuellement fixée par l’accord et déjà comptabilisées ;
- les heures effectuées au-delà de la moyenne de 35 heures calculée sur la période de référence fixée par l’accord ou par le décret, déduction faite des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire fixée, le cas échéant, par l’accord ou par le décret et déjà comptabilisées.
Le texte reprend la définition actuelle des heures sup en cas de modulation ou d’annualisation.
La sous-section 8 de la section 1 du chapitre III du titre II du livre premier de la troisième partie est supprimée.
Conclusion. Alors que l’annualisation et ses variations de charge produisent déjà stress et maladies professionnelles chez les salariés, on se dirige ici vers ce qu’on peut qualifier de travail au sifflet : les garanties offertes par la négociation pour encadrer le recours à ces organisations du travail particulièrement violentes pour les salariés disparaissent.
Décryptage par Lucy Bateman